Des parasites génétiques en action dans le développement du système immunitaire?

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Une étude de l’équipe de Claude Perreault propose trois fonctions potentielles pour des séquences d’ADN dites «parasites» dans le développement des lymphocytes T.

Une récente étude réalisée par l’équipe de Claude Perreault , professeur à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal et chercheur principal à l’Unité de recherche en immunobiologie de l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie, propose trois fonctions potentielles pour des séquences d’ADN dites «parasites» dans le développement des lymphocytes T. Mené par le doctorant Jean-David Larouche, le travail fait l’objet d’une publication dans le journal eLife.

Une forte présence dans des cellules requises pour l’établissement de la tolérance au soi

Les lymphocytes T sont des cellules immunitaires mobilisées dans l’élimination des cellules infectées et des cellules cancéreuses. Le «T» renvoie à l’organe dans lequel ils complètent leur développement: le thymus. C’est à cet endroit qu’ils apprennent à tolérer les cellules normales du corps (c’est-à-dire le soi) et à détecter les envahisseurs comme les agents infectieux ou les cellules cancéreuses (le non-soi).

De façon intéressante, des fragments d’ADN appelés «éléments transposables» sont exprimés à des niveaux plus élevés dans certaines cellules du thymus que dans le reste du corps. Qualifiés de «parasites génétiques», les éléments transposables sont des vestiges d’infections virales qui représentent environ 45 % du génome humain. Le fait que leur activité est plus grande dans le thymus soulève une question importante: les éléments transposables ont-ils un rôle à jouer dans le développement des lymphocytes T?

Pour répondre à cette question, le groupe du laboratoire de Claude Perreault a effectué des analyses multiomiques - c’est-à-dire qu’il a eu recours à un ensemble de techniques permettant d’analyser plusieurs milliers d’indicateurs simultanément et d’en dégager une vue d’ensemble - dans des cellules thymiques humaines et murines. Les données obtenues révèlent que l’expression des éléments transposables dans le thymus humain varie d’un type cellulaire à l’autre de même qu’au cours du développement. Deux types de cellules expriment fortement les éléments transposables: les cellules épithéliales thymiques médullaires et les cellules dendritiques plasmacytoïdes. Ces deux populations cellulaires sont essentielles à l’établissement de la tolérance au soi chez les lymphocytes T.

Des fonctions multiples pour le système immunitaire?

L’équipe a désigné trois fonctions potentielles des éléments transposables dans le thymus. D’abord, en liant de nombreux facteurs de transcription, ils contribuent à établir différents réseaux de régulation génique. Ensuite, en stimulant la sécrétion de certaines molécules, ils créent un microenvironnement propice au développement des lymphocytes T. Enfin, en présentant certains fragments de molécules à leur surface, ils contribuent à l’éducation des lymphocytes T. Les éléments transposables pourraient donc jouer plusieurs rôles dans le développement et la fonction du système immunitaire.

Les résultats obtenus donnent à penser que l’expression des éléments transposables dans les cellules du thymus est critique pour prévenir des réactions auto-immunes chez les vertébrés. Par ces nouvelles connaissances, la mise au point d’immunothérapies efficaces et sécuritaires ciblant les éléments transposables, exprimés fortement dans les tumeurs, pourrait être facilitée.

À propos de cette étude

L’article « Transposable elements regulate thymus development and function », par Jean-David Larouche et ses collègues, est paru dans le journal eLife le 18 avril 2024.