Un projet pilote novateur à Sutton pour une densification urbaine durable et solidaire

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L’un des principaux objectifs du projet est de proposer des solutions conc
L’un des principaux objectifs du projet est de proposer des solutions concrètes à la crise du logement que vivent de nombreuses communautés partout au Québec. Crédit : Alexandre Landry
Un projet d’architecture à Sutton propose de répondre à la crise du logement en alliant développement durable et inclusion sociale.

Un projet pilote à Sutton explore des solutions pour répondre à la pénurie de logements tout en intégrant des pratiques de développement durable. Il devrait permettre de créer un outil de planification territoriale adaptable à d’autres municipalités.

Ce projet dirigé par Alexandre Landry, professeur invité à l’École d’architecture de l’Université de Montréal et directeur de L’Ensemble, un organisme à but non lucratif dont la mission est de mobiliser l’innovation architecturale et urbaine au profit de l’aménagement solidaire du territoire, est soutenu par le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, la municipalité régionale de comté (MRC) de Brome-Missisquoi, l’organisme Territoires solidaires et la Chaire UNESCO en paysage urbain de l’UdeM.

Recensement des terrains et conception de projets d’architecture

Le projet a démarré par la recherche de terrains, qui a permis de désigner des emplacements au potentiel inexploité dans cinq municipalités de la MRC de Brome-Missisquoi. Dans un atelier de troisième année en architecture à l’Université de Montréal, Alexandre Landry a guidé ses étudiants et étudiantes dans l’analyse des caractéristiques des villes pour mieux comprendre les dynamiques territoriales. Le but était de brosser un tableau des zones où des projets de densification pourraient être soumis.

Sutton, avec son dynamisme local, a été sélectionnée comme lieu d’expérimentation. La proximité des lieux recensés, la vitalité de la communauté et le potentiel de croissance durable ont fait de cette municipalité un terrain idéal pour l’implantation du premier laboratoire de ce genre au Québec.

Ainsi l’été dernier, neuf projets d’architecture sur neuf terrains ont été conçus à l’intérieur du périmètre urbain de Sutton. «Les étudiantes et les étudiants ont réfléchi à des projets différents les uns des autres. Ils les ont pensés en termes de reproductibilité afin que, bien qu’adaptés aux spécificités locales, ils puissent être mis en oeuvre dans d’autres municipalités de la province», explique Alexandre Landry.

Un plan d’aménagement innovant pour répondre à la crise du logement

L’un des principaux objectifs du projet est de proposer des solutions concrètes à la crise du logement que vivent de nombreuses communautés partout au Québec. Avec plus de 200 logements supplémentaires répartis sur les neuf lieux désignés à Sutton, le projet vise à offrir une diversité d’habitations accessibles à tous.

Alexandre Landry souligne l’importance de loger chacun directement dans la ville où il travaille, plutôt que d’imposer des déplacements quotidiens. «Certains salariés saisonniers doivent parcourir de longues distances, par exemple à partir de villes comme Granby, pour venir travailler à Sutton. Ce projet permettrait de répondre à leurs besoins en créant des logements abordables au coeur même de la ville, ce qui contribuerait à réduire les trajets en voiture et encouragerait des modes de transport plus durables», indique-t-il.

Une densification au service du développement durable

La densification urbaine peut être perçue de manière négative, notamment dans les communautés rurales ou de villégiature, où les habitants sont attachés à l’idée de préserver des lieux ouverts et une faible densité de population. Le projet pilote de Sutton veut montrer qu’une densification bien pensée peut, au contraire, améliorer la qualité de vie tout en respectant l’environnement. L’aménagement proposé vise à limiter l’étalement urbain, à favoriser le transport actif et à intégrer des aires publiques où les résidants pourront se rencontrer et échanger.

«L’approche que nous adoptons ici aura un effet positif non seulement sur l’environnement, mais aussi sur la cohésion sociale. En concevant des lieux de vie plus proches des services et des commerces, nous contribuons à réduire l’usage de la voiture et à créer des quartiers plus dynamiques et reliés», mentionne Alexandre Landry.

«Ce projet permet de réfléchir à la façon de faire cohabiter différentes populations, des familles, des personnes âgées, des travailleurs saisonniers», poursuit Shin Koseki , chercheur principal du projet et titulaire de la Chaire UNESCO en paysage urbain à l’Université de Montréal.

Une consultation publique pour entendre la communauté

La réussite de ce projet repose aussi sur l’adhésion de la communauté locale. C’est pourquoi une consultation publique aura lieu en février prochain, durant laquelle la population de Sutton pourra découvrir les maquettes créées par les étudiants et étudiantes en architecture et mieux comprendre la vision derrière le projet. Cette consultation sera l’occasion de démystifier la densification et d’expliquer comment elle peut répondre aux besoins des résidants tout en préservant le cadre de vie qui fait la richesse de cette région.

«Nous voulons montrer à la population que la densité n’est pas nécessairement une menace à leur qualité de vie. Au contraire, elle peut avoir des avantages significatifs, comme de meilleurs services, des lieux de rencontre et une vitalité accrue de la ville. C’est le message que nous voulons faire passer durant la consultation publique», dit Alexandre Landry. Cette consultation a aussi pour but de recueillir les avis des résidants sur les projets présentés et de connaître les initiatives qu’ils aimeraient voir mises sur pied à Sutton.

Reproduire le projet ailleurs au Québec

Ce projet à Sutton s’inscrit dans une démarche pragmatique destinée à répondre aux besoins des communautés tout en suscitant la réflexion sur les moyens d’intégrer des savoirs multiples - scientifiques, techniques, professionnels et citoyens - dans le processus de conception et de réalisation. «Il comporte une approche de recherche-action qui vise à avoir des effets concrets sur les politiques publiques et les pratiques d’aménagement», déclare Shin Koseki.

L’une des ambitions du projet est d’adapter cet outil de planification à d’autres réalités urbaines. Selon Alexandre Landry, «le projet doit être flexible pour pouvoir répondre aux besoins de différentes communautés à travers le Québec, qu’il s’agisse de petites municipalités rurales comme Sutton ou de villes plus grandes et plus étalées comme Cowansville». Les emplacements sélectionnés pour le projet pilote à Sutton, comme des friches ferroviaires ou des ensembles religieux désuets, sont représentatifs de situations qu’on trouve dans d’autres régions, ce qui ouvre la voie à une reproductibilité à plus grande échelle.

«Dans les phases suivantes, nous allons confronter cet outil à d’autres réalités démographiques et sociales pour voir comment il peut s’adapter et avoir une influence positive», observe Alexandre Landry. L’objectif ultime est de mettre cet outil à la disposition des municipalités québécoises afin de promouvoir une offre de logement plus solidaire et durable à l’échelle de la province. Les municipalités du Québec qui sont intéressées par cette démarche sont invitées à contacter L’Ensemble ou la Chaire UNESCO en paysage urbain.

La Chaire UNESCO en paysage urbain, un partenaire clé

La Chaire UNESCO en paysage urbain à l’Université de Montréal joue un rôle clé dans ce projet en apportant une expertise interdisciplinaire qui va au-delà de la conception architecturale. Shin Koseki, titulaire de la Chaire, explique que ce projet s’inscrit également dans plusieurs axes prioritaires de la Chaire, dont le développement durable, l’inclusion sociale et la mise en valeur des savoir-faire locaux.